Marianne Delorme aka Calling Marian est une DJ et productrice en pleine ascension. Icône des soirées LGBT lyonnaises en résidence à La Chatte puis Arm Aber Sexy, la DJ est actuellement basée à Paris où elle enchaîne les gigs et les projets artistiques avec son collectif Conspiration.
Image mise en avant : © Jean Ranobrac
A l’heure où son dernier EP, Rainmaking, sort sur son propre label, CVNT Records, créé il y a seulement quelques mois, on la retrouve dans un live de Techno à 4, Sale Affaire, aux côtés de ses partenaires de crime MAZE et Submarine FM. Aux dernières nouvelles, Calling Marian brillait sur la scène des Inouïs au Printemps de Bourges, en remportant le prix du jury. On ne pouvait pas passer à côté de cette figure émergente de la scène électronique française.
Toi
WODJ MAG : Est-ce que tu peux te présenter pour toutes celles et tous ceux qui te découvrent ?
Je m’appelle Marianne, je suis née dans les années 90. J’ai grandi à Montpellier, puis j’ai vécu à Lyon où j’ai commencé à mixer, et enfin Paris. Je suis musicienne, DJ et productrice.
Tu as commencé la musique quand et pourquoi ?
J’ai commencé à prendre des cours de guitare vers 11 ans. J’avais improvisé sur celle de mon frère et je pensais sans aucune modestie à ce moment là que j’avais un don (non). Ensuite ça m’a suivi, j’ai fait une fac de musicologie et un peu de conservatoire. Je ne sais pas trop « pourquoi », il y a des musiciens dans ma famille, mon père est disquaire, je crois que ça s’est fait comme ça.
Depuis quand fais-tu du live et quel a été le déclencheur ?
Il n’y a pas vraiment eu d’élément déclencheur. La performance live, la restitution publique font partie de la vie des musiciens pour présenter leur travail, et j’y suis venue un jour, parce que « quand faut y aller, faut y aller ». C’était important après m’être cachée plusieurs années derrière des DJ set, de prouver que je pouvais aller plus loin.
Quel est ton style ?
Elle est difficile cette question parce que je ne crois pas que je m’inscrive dans un seul style vraiment défini. Pour aller vite je dirais Techno, mais tout dépend de mon humeur si je produis, de l’ambiance si je suis en DJ set. Je joue et compose aussi des morceaux electro, downtempo, acid… Il y a pas mal d’influences trance aussi dans mes sons, pour le coté happy des mélodies.
Si tu pouvais te définir en une track, quelle serait-elle ?
Je crois que c’est impossible… Mais pour le troll je dirais « Ta mère elle va jumper » de Boris.
© Trou aux Biches
La production
Tu as été assez productive ces dernières années notamment en signant des remix assez extravagants, je pense à « Moi Lolita » ou « Capitaine Abandonné », puis tu es rentrée dans la techno pure et dure avec tes EP 1999X, The Parade chez Jarring Effects Lab et plus récemment Pisces chez Cunt Rec… Parle-nous de cette évolution ?
J’ai toujours fais des reprises de morceaux pop, (Rihanna, Françoise Hardy aussi entre autres). C’est plutôt facile, c’est un bel exercice et c’est très marrant à faire. Après j’ai eu envie de développer une identité musicale qui me serait propre, proposer mes sons. C’est un procédé plus sérieux, qui s’inscrit davantage dans un contexte « adulte ». Ceci dit je fais toujours des reprises ou des détournements en privé pour faire marrer mes amis.
Quel est ton processus de création, et sur quelle machine tu bosses ?
J’utilise quelques synthés. Des korgs et un digitone principalement. Pour le rythme j’ai une Tanzbar et des samples de 909. Je travaille sur Ableton pour tout, le live et la production. Je produis assez vite quand j’ai une idée ou un objectif, c’est devenu une habitude.
Tes projets
Tu as annoncé sur ta page FB que tu avais créé ton label le jour de ton anniversaire, soit le 21 mars dernier, je cite : « Aujourd’hui c’est mon anniversaire, et comme cadeau j’ai décidé de m’offrir mon propre label de musique, CVNT Records. » Tu signeras le remix survolté de Cinder, « Pisces ».
Comment tu te projettes dans cette nouvelle aventure ?
Pas tellement différemment d’avant, la chose qui change c’est que je me plonge dans le monde de la com, des relations presses et de l’administration musicale, mais c’est passionnant ! J’apprends plein de trucs qui me permettent de mieux mettre en valeur la musique que je produis et in fine tout gérer moi même.
Tu as déjà un roster en place ?
Non pas du tout ! Je pense utiliser cette plateforme pour sortir mes productions, des remix , des maxis, ou des various, mais pas vraiment faire du développement d’artiste pour le moment. Mes moyens sont encore limites pour ça, mais dans le futur pourquoi pas !
Quel artiste tu rêverais de signer et pourquoi ?
Pas un.e artiste en particulier, mais je rêverai de promouvoir de la musique de qualité avec des principes égalitaires. Ça me branche davantage d’offrir de la visibilité à des producteur.trices remplis de talent qu’on ne voit jamais que de faire du fric sur un profil ou un style particulier. (Et puis bonne chance pour faire du fric avec un label de toute façon !)
Tu es une DJ reconnue dans la communauté LGBT, tu joues souvent sur Lyon, ta ville natale, et Paris, ta ville d’adoption, comment tu te positionnes dans ce mouvement ? Et comment tu portes les couleurs de ta communauté à travers ton art ?
Je soutiens évidement toutes les causes liées aux luttes des personnes issues des minorités de genre ou sexuelles, je joue souvent dans des évènements en lien avec ces combats car ils sont très importants pour moi. Je crois que jouer, occuper l’espace artistique, avoir de la visibilité en étant une femme lesbienne est en soi un acte militant, et tend à prouver chaque jour la mutation (lente certes) du monde patriarcal dans lequel on évolue.
Dis-nous en plus
Quelles sont les 5 tracks que tu as toujours avec toi ?
01. Geinst – Telepath
02. Alien Alien – Sambaca
03. You Man – Birdcage
04. Jeanne Added – Look at Them
05. Flavien Berger & Etienne Jaumet – Arco Iris
T’as un morceau que tu kiffes en cachette ?
Alizée – « Gourmandises », mais c’est pas du tout en cachette.
© Cybele Vigneron
Un souvenir de ta meilleure soirée ? De ta pire soirée ?
Il y en a eu tellement des bonnes ! Le Goutez Electroniques de Nantes était une expérience folle, c’est la première qui me vient à l’esprit. Je ne crois pas avoir déjà passé de mauvaises soirées, au pire des soirées peu mémorables, mais du coup je ne m’en souviens pas.
L’endroit le plus WTF où tu aimerais mixer ?
Je crois que je ne suis pas très exigeante, plus que le lieu je pense que c’est l’ambiance qui compte. Sinon c’est pas vraiment WTF, mais j’aimerais beaucoup aller jouer à l’autre bout de la planète, voir comment on fait la fête loin de Paris.
C’est quoi ton plus grand rêve ? Comment tu comptes l’atteindre ?
J’aimerais que les gens puissent vivre dignement de leur musique, et je pense que ça passe par des engagements personnels, et des politiques favorisant la culture et son développement.
Merci Calling Marian.
Merci au producteur lyonnais ØuterSunset, de nous avoir permis de réaliser cette interview.